Les Amis de Guillaume Budé – Dante et la Renaissance italienne

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Cette chronique  raconte la vie des Classiques à la Renaissance. Des contemporains de l’humaniste Guillaume Budé (1467-1540) permettent de voir comment l’Antiquité alimente la culture, la pensée et la langue de l’époque.

Dante, considéré comme le premier humaniste, a été lu (et commenté !) au fil des siècles jusqu’à nos jours. Ce qui nous intéresse aujourd’hui, c’est sa place dans les lectures humanistes. « On cite plus de quarante commentateurs antérieurs à Marsile Ficin [1433-1499], dix-huit lecteurs publics avant Landino [1424-1498], quinze biographes de Dante en moins de deux siècles. » (Marc Monnier, La Renaissance, de Dante à Luther,  Paris, Firmin-Didot, 1884, p. 74) Le sujet est assez vaste et nous évoquerons les humanistes italiens pour commencer.

Parmi eux, citons d’abord Boccace (1313-1375), qui lui consacre une biographie, et Leonardo Bruni (1370-1444). Augustin Renaudet tempère l’admiration de ce dernier : « Dans l’œuvre de Dante, dont il vénère et glorifie la mémoire, il ne sait trouver qu’une synthèse de tout savoir humain, sans s’attarder beaucoup à ce qui serait l’essentiel pour une âme travaillée du souci de la perfection chrétienne. » (Érasme et lItalie, Genève, Droz, [1954], 1998, p. 121) De la même manière, Marc Monnier remarque que « Ce que Marsile Ficin adorait chez Dante, c'était Platon. » (La Renaissance, de Dante à Luther, p. 76)

Les lecteurs de La Vie des Classiques connaissent bien Machiavel (1469-1527), grâce à la précédente saisons des « Amis de Guillaume Budé », or l’auteur du Prince est un grand lecteur de Dante. Il le confie sans détour à Francesco Vettori, ambassadeur de Florence auprès du Saint-Siège, dans sa lettre, datée du 10 décembre 1513. Il est à noter que, comme Dante, Machiavel a été exilé de Florence et mis à l’écart de la politique. Machiavel raconte dans cette lettre comment il occupe ses journées et il explique le projet de son « opuscule de Principatibus ». Le matin, il se promène :

« J’ai sur moi un livre, ou Dante ou Pétrarque, ou un de ces poètes mineurs, comme Tibulle, Ovide et autres. Je lis les récits de leurs passions amoureuses et de leurs amours ; je me rappelle les miennes ; je me complais un bout de temps à y penser. […] Le soir venu, je m’en retourne chez moi et je pénètre dans mon cabinet de travail […] Et comme Dante dit que comprendre sans retenir ne fait pas science, j’ai noté ce dont, en conversant avec eux, j’ai fait trésor, et en ai composé un opuscule de Principatibus, où je m’étends du mieux que je peux dans la réflexion sur ce sujet, disputant ce qu’est une principauté, combien d’espèces il y en a, comment on les acquiert, on les conserve, pourquoi on les perd. » (extrait traduit et cité par Paul Larivaille dans le Prince, p. XIII-XIV).

Notons que, « lorsqu’en 1570 Benedetto Varchi [1502-1565], dans son Ercolano, proclama Dante supérieur en maint endroit à Virgile et à Homère, il souleva des tempêtes. » (La Renaissance, de Dante à Luther, p. 77)

En outre, Michel-Ange (1475–1564), grand artiste de la Renaissance italienne, lisait Dante. « Ce fut longtemps sa lecture accoutumée, peut-être unique. Il possédait un exemplaire in-folio de la Divine Comédie avec six pouces de marge : et, en le lisant, il dessinait ce qu’il voyait. » (La Renaissance, de Dante à Luther, p. 501) Cet exemplaire a malheureusement été perdu. Cependant les dessins préparatoires de Botticelli, peintre et humaniste, nous sont parvenus et nous en parlerons dans la prochaine chronique.

 

« Onorate laltissimo poeta ; / lombra sua torna, chera dipartita. »
« Honorez le très grand poète ; / son ombre revient, qui était partie. »

 

Image : Dante, par Luca Signorelli (fresque de la cathédrale d’Orvieto)
Dante, par Luca Signorelli (fresque de la cathédrale d’Orvieto, source : Wikimedia)

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