Décembre sous le signe des mots grecs et latins !
Cette année, du 1ᵉʳ au 24 décembre, La Vie des Classiques vous propose un voyage quotidien au cœur des langues anciennes. Chaque jour, un mot grec ou latin – choisi pour sa beauté, son étrangeté, sa force évocatrice ou son actualité – sera présenté par l’un·e de nos auteur·trice·s. Étymologie, usages, petites histoires, dérivés modernes, sens perdus ou retrouvés… Ces mots ouvrent une fenêtre sur la manière dont les Anciens pensaient le monde, et sur la façon dont leurs mots continuent d’habiter le nôtre.
μῆτις
Ce mot grec, comme μῦθος, m’occupe depuis des années et me revient sans cesse, parce qu’il contient en lui cette hallucinante capacité de la langue grecque à faire naître la pensée de la matière. En effet, la μῆτις, l’intelligence, suppose la totale imprégnation du réel, pour ensuite en tirer une réflexion, voire une décision ou une action. La μῆτις embrasse le monde pour s’en abstraire puis y retourner. Reposant sur l’empathie et le vivant, tournée vers les autres et le futur, elle est une collaboration avec la terre dont elle fait naître l’idée de demain. Bien sûr, je ne suis pas peu fière que les Grecs aient donné des traits féminins à la divinité initiatrice de cette qualité primordiale qui concilie, voire réconcilie la réflexion et l’action. Depuis Hésiode associée à la figure du politique, elle va à mon avis bien au-delà : elle est l’intelligence de la vie, voire de la survie, se nourrissant et croissant « avec les moyens du bord », à l’image de son héros, Ulysse. Elle est au cœur de mon métier d’éditrice – et j’espère ne pas en manquer trop souvent ! – lorsqu’il s’agit de donner la forme idoine à la pensée d’un auteur. Elle est enfin au cœur de mes engagements : comprendre le passé et le présent pour discerner l’avenir, quelle meilleure définition des humanités ?
Proserpine
Illustration de Djohr
Avec l'aimable autorisation de l'artiste
Laure de Chantal