Des élèves du Lycée La Bruyère de Versailles racontent... V. Joséphine

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Chaque semaine, des élèves du lycée La Bruyère de Versailles racontent leur rapport aux langues anciennes, leur lien si particulier à ces langues que l'on étudie de moins en moins...

L’expérience d’une vie : Les Lettres Classiques.

      Souvenez-vous que Pascal dit un jour : « Si le nez de Cléopâtre eût été plus court, toute la face de la terre aurait changé ». Il en va de même pour les Lettres Classiques alors que les latinistes et les hellénistes ne sont pourtant qu’une minorité, jugée souvent comme étant composée d’individus archaïques voire ridicules. Sans cet intérêt pour ces langues anciennes, la culture et la langue de plusieurs civilisations ne seraient en effet aujourd’hui qu’un lointain souvenir. Le latin, tout comme le grec ancien, sont les racines de notre langue française, qui continue à travers le temps de s’épanouir et d’évoluer. Mais l’origine, elle, reste par hypothèse définitivement figée. Pour comprendre notre monde présent, les attitudes de certaines ethnies ou les coutumes des pays, l’Homme remontre l’histoire. Il en va ainsi pour l’enseignement de notre langue. Pour la comprendre, il faut connaître son fondement, et de là, saisir son évolution. C’est pourquoi l’enseignement du latin et du grec me paraît indispensable.

 

Epidaure, février 2018

       Souvenez-vous, lorsque dès votre plus jeune âge, les livres de la mythologie grecque et romaine constituaient une bonne partie de votre première bibliothèque. Chaque enfant a été passionné par le voyage d’Ulysse dans l’Odyssée d’Homère, par la Guerre de Troie, la belle Vénus, la courageuse Athéna dans son combat contre Apollon pour la nouvelle ville porte son nom, Athènes. On pourrait encore citer la fatalité incroyable de ces jeunes jumeaux Romulus et Rémus, destinés à fonder le plus grand Empire : Rome. Et même Astérix, dont les Aventures ont égayé notre jeunesse, en relatant cette période de l’histoire où les Romains étendaient leur domination sur le monde, témoigne de notre lien avec les langues anciennes, à travers par exemple cette célèbre citation de Jules César « Veni, Vedi, Vici » souvent reprise dans cette série de bande dessinée. Oui, que nous soyons vieux, dans la force de l’âge, dans l’épanouissement de la jeunesse, ou dans notre plus tendre enfance, nous avons déjà tous touché ces civilisations.

      Souvenez-vous, lorsque vous visitez des anciens monuments ou des musées, de cette personne à côté de vous, qui sans lire la traduction française, arrive à comprendre rien qu’en lisant les inscriptions en latin et en grec le message gravé. Après avoir traduit elle-même, cette personne, qui fait l’admiration de tous, lit ensuite la traduction proposée, et là, nous voyons dans ses yeux la joie de voir qu’elle avait réussi sa traduction. Cette fierté d’une telle connaissance et d’une parfaite maîtrise de la langue, n’est possible que pour les latinistes et les hellénistes fiers d’avoir persévéré tant d’années pour arriver à leurs fins et ne plus dépendre d’auteurs pour déchiffrer les propos des anciens. Nous avons déjà tous rencontré durant nos visites, ces jeunes, ou ces moins jeunes, car l’enseignement de ces langues se conçoit à tout âge, leur émerveillement devant les inscriptions, les fresques ou les peintures qu’ils ont étudié pendant leurs cours, et qu’ils retrouvent là, dans les musées ou bien sur les sites.

       Souvenez-vous lorsqu’au cours d’un dîner de famille, un enfant vous a demandé d’écrire le mot « schéma » sans savoir où étaient le « s », le « c » ou s’il y avait les deux, et que vous lui donniez l’orthographe. Mais suite à votre réponse trop courte, c’est à ce moment-là qu’un autre convive fut capable de lui révéler qu’il s’agissait du mot grec « σχῆμα » signifiant « figure » et retranscrit avec notre alphabet. Cet enfant qui, comme de nombreux autres, trouvait l’origine des mots extraordinaires, comprenait ainsi le sens des mots « étymologie », « orthographe » ou « alphabet » et par là même d’où ils venaient. Une bonne partie du dîner tournait, à la suite de cette intervention, autour de l’enseignement de ces langues et des différentes options choisies pour le bac. Si certains avaient choisi les langues vivantes ou les sciences, le convive remarqué avait pris les langues anciennes.

      Encore aujourd’hui, des jeunes choisissent, tout comme moi, l’enseignement du latin et du grec, car oui, il faut bien se l’avouer, nous avons été bercés par leurs civilisations et leurs coutumes dès notre plus jeune âge. Aller aux cours de latin et de grec, ce n’est pas seulement avoir des heures supplémentaires mais c’est surtout renforcer des amitiés spéciales car n’étant pas nombreux, nous nous connaissons bien. C’est également devenir cette personne qui peut dire « oui, j’ai six heures de plus, j’en serai à ma septième année de latin et sixième année de grec en fin de terminale, mais moi je peux t’expliquer l’origine de notre langue, son évolution à travers les âges, te traduire les inscriptions, décoder les allusions qui se trouvent dans des livres sur le peuple latin et grec, raconter la fondation de Rome, le serment d’Hippocrate, ou encore le procès de Socrate ». Alors, face à cette culture générale qui est tout sauf superficielle, comment refuser l’enseignement des Lettres Classiques ?  S’il y a bien quelque chose à retenir de mon témoignage de latiniste et d’helléniste, c’est bien de ne pas avoir peur de ces enseignements et de les essayer vous aussi, à votre tour : devenez latinistes et hellénistes !

Joséphine B. - 1ère L – spécialité LCA grec – LCA latin option

 

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